Saisie immobilière : irrecevabilité du pourvoi sans appel préalable

La Cour de cassation rappelle que les jugements de saisie immobilière statuant sur des contestations doivent d'abord faire l'objet d'un appel avant tout pourvoi en cassation. L'arrêt du 12 juin 2025 précise également que les décisions ordonnant la poursuite de la procédure après échec d'une vente amiable ne sont pas susceptibles de pourvoi, sauf excès de pouvoir caractérisé. Civ2, 12 juin 2025, pourvoi n° 22-23.005

La double irrecevabilité du pourvoi en saisie immobilière : entre concentration des moyens et limitation des voies de recours

Introduction

L'arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 12 juin 2025 constitue une illustration paradigmatique de la rigueur procédurale qui caractérise le contentieux de la saisie immobilière. Cette décision, publiée au Bulletin sous le numéro 22-23.005, met en lumière deux aspects fondamentaux du régime des voies de recours en matière d'exécution immobilière : d'une part, l'application stricte du principe de concentration des moyens énoncé à l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution, d'autre part, les limites du pourvoi en cassation contre les décisions ordonnant la reprise de la procédure après échec de la vente amiable.

Cette affaire trouve ses origines dans une procédure de saisie immobilière initiée par un commandement de payer délivré à Mme F., veuve O., le 14 décembre 20211. Après autorisation de vente amiable par le juge de l'exécution et échec de cette tentative, le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse a rendu le 30 août 2022 un jugement déclarant irrecevable la contestation de la débitrice fondée sur la prescription et ordonnant la reprise de la procédure sur vente forcée. Le pourvoi formé contre cette décision a été déclaré totalement irrecevable par la Cour de cassation, offrant l'occasion de préciser deux régimes d'irrecevabilité distincts mais complémentaires.

I. La procédure de saisie immobilière et ses impératifs temporels

A. Le commandement de payer valant saisie : acte générateur d'effets substantiels

Le commandement de payer valant saisie immobilière constitue l'acte déclencheur de la procédure d'exécutionimmobilière2. Cet acte produit des effets juridiques considérables dèssa signification au débiteur et sa publication au service de publicité foncière. L'indisponibilité du bien, la saisie de ses fruits et la restriction aux droits de jouissance et d'administration du débiteur courent à l'égard de celui-ci à compter de la signification du commandement. Cette indisponibilité constitue un mécanisme protecteur essentiel pour les créanciers, empêchant le débiteur de dissiper ses biens au détriment de ses créanciers.

La jurisprudence récente précise que le débiteur qui a consenti une promesse de vente postérieurement à la délivrance d'un commandement de payer valant saisie immobilière n'est pas fondé à se prévaloir des effets de l'indisponibilité du bien2. Cette solution illustre la cohérence du système qui privilégie la protection des créanciers poursuivants sur les actes accomplis postérieurement à la saisie.

B. L'audience d'orientation :moment clé de la purge des contestations

L'audience d'orientation constitue le cœur de la procédure de saisie immobilière. Cette audience, tenue devant le juge de l'exécution, détermine la suite de la procédure et constitue un moment central pour toutes les parties. Le juge vérifie que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies.

Le créancier poursuivant doit assigner le débiteur dans les deux mois suivant la publication du commandement de payer valant saisie. Cette assignation est dénoncée à tous les créanciers inscrits dans les cinq jours. L'assignation doit contenir les mentions obligatoires : date, heure, lieu de l'audience, possibilités de contestation, demande de vente amiable. À défaut, la nullité peut être invoquée si un grief est démontré.

Lors de cette audience, le jugede l'exécution vérifie la validité du titre exécutoire, que l'immeuble est saisissable, et statue sur toutes les contestations et demandes incidentes. Ilstatue également sur le montant de la créance, y compris frais, intérêts et accessoires.

II. La concentration des moyens : fondement et portée

A. L'évolution jurisprudentielle du principe de concentration

Le principe de concentration des moyens a été dégagé par la jurisprudence, par touches successives. L'arrêt fondamental du 7 juillet 2006 de l'Assemblée plénière a établi qu'"il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci". Ce principe vise à assurer une bonne administration de la justice en réduisant le risque de manœuvres dilatoires et à favoriser un jugement dans un délai raisonnable.

La Cour européenne des droits de l'homme a validé ce principe en considérant que "le principe de la concentration des moyens tend à assurer une bonne administration de la justice en ce qu'il vise à réduire le risque de manœuvres dilatoires et à favoriser un jugement dans un délai raisonnable", ajoutant que "la limitation au droit d'accès à un tribunal qu'il opère s'inscrit donc dans un objectif légitime".

B. L'application spécifique en matière de saisie immobilière

En matière de saisie immobilière, le principe de concentration des moyens est érigé à l'article R. 311-5 du Code des procédures civiles d'exécution. Ce texte impose qu'à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut être formée après l'audience d'orientation, sauf si elle porte sur des actes de procédure postérieurs à celle-ci.

L'application stricte de ces dispositions à l'égard de l'ensemble des parties avait été renforcée par l'arrêt du 14 novembre 2019, aux termes duquel la deuxième chambre civile précisait qu'un simple moyen exposé pour la première fois en cause d'appel contrevenait aux dispositions de l'article R. 311-5. Cette rigueur s'explique par la volonté d'éviter les manœuvres dilatoires des débiteurs tout en permettant une purge efficace des contestations avant la phase d'adjudication.

C. L'atténuation du principe par l'office du juge

L'obligation de concentration des moyens ne doit toutefois pas être mal interprétée. Cette obligation ne saurait porter sur des demandes qui n'entreraient pas dans les attributions du juge de l'exécution, rappelées à l'article L. 213-6 du Code de l'organisation judiciaire. Le principe de l'article R. 311-5 qui impose une rigoureuse concentration des moyens se trouve quelque peu nuancé par les pouvoirs de vérification du juge de l'exécution qui pourra relever d'office certaines difficultés que n'auraient pas soulevées les parties saisies.

III. Les voies de recours en saisie immobilière : un régime complexe et évolutif

A. Le principe général :l'appel comme voie de droit commun

L'article R. 311-7 du code des procédures civiles d'exécution établit le principe général selon lequel, en procédure de saisie immobilière, les jugements sont susceptibles d'appel sauf disposition contraire. La Cour de cassation en déduit logiquement que "le jugement qui, en procédure de saisie immobilière, statue sur une contestation, est, sur ce chef, susceptible d'appel".

Cette solution s'inscrit dans la cohérence du système procédural de la saisie immobilière qui privilégie l'appel comme voie de droit commun. Elle permet d'éviter l'engorgement de la Cour de cassation par des pourvois prématurés et garantit un double degré de juridiction effectif pour les contestations portant sur le fond du droit.

B. Les exceptions au principe: les décisions insusceptibles d'appel

Certaines décisions échappent au principe général et ne sont pas susceptibles d'appel. Ainsi, selon l'article R.322-22 du code des procédures civiles d'exécution, la décision qui ordonne la reprise de la procédure n'est pas susceptible d'appel. Cette règle vise à garantir l'efficacité et la rapidité des procédures d'exécution, évitant ainsi des retards inutiles dans le processus de recouvrement des créances.

La décision qui ordonne la reprise de la procédure après échec de la vente amiable constitue une mesure d'administration judiciaire destinée à permettre la poursuite de la procédure d'exécution. Elle ne tranche pas le principal, ne met pas fin à l'instance et n'est donc pas susceptible de pourvoi immédiat.

C. L'évolution récente :assouplissement et formalisme excessif

La jurisprudence récente témoigne d'un assouplissement progressif des règles de recevabilité. Dans son arrêt du23 mai 2024, la Cour de cassation a annulé un arrêt déclarant irrecevable l'appel d'un jugement d'orientation en procédure de saisie immobilière au motif que la requête ne contenait pas les conclusions au fond. La Cour a jugé cette exigence disproportionnée et contraire au droit d'accès au juge garanti par l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme.

Cette évolution s'inscrit dans une lutte plus générale contre le formalisme excessif. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation a dû adopter un contrôle de proportionnalité, inabstracto et in concreto, afin d'appréhender le formalisme excessif qui est "affaire de bon sens".

IV. L'autorité de chose jugée du jugement d'orientation

A. Portée et étendue de l'autorité de chose jugée

Le jugement d'orientation prononcé en matière de saisie immobilière a l'autorité de la chose jugée quant à l'existence et au montant de la créance du créancier poursuivant, même si ces éléments n'ont pas été contestés devant le juge de l'exécution. Cette autorité de chose jugée attachée au jugement d'orientation avait déjà été affirmée par arrêt de la Chambre commerciale du 13 septembre 2017.

L'autorité de la chose jugée rend irrecevable la contestation formée postérieurement sur le principe et le montant de la créance. Cette solution protège l'efficacité de la procédure en évitant la remise en cause perpétuelle des décisions du juge de l'exécution.

B. Limites de l'autorité de chose jugée

L'autorité de la chose jugée n'apparaît toutefois pas comme un principe extensif selon la deuxième chambre civile. Elle ne s'étend qu'aux éléments effectivement tranchés par le juge de l'exécution dans le cadre de ses attributions légales. Les contestations qui n'entrent pas dans le champ des attributions du juge de l'exécution ne sont pas couvertes par cette autorité.

V. La prescription en matière de saisie immobilière

A. Le nouveau régime de prescription extinctive

Le nouveau régime de prescription extinctive de créance issu de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 impose aux praticiens de l'exécution de s'interroger sur ses conséquences au regard de la procédure de saisie immobilière. Par application combinée des articles 3-1 de la loi du 9 juillet 1991 et L. 137-2 du code de la consommation, le délai de prescription est de 2 ans.

Le délai court à compter de la déchéance du terme. Selon l'article 2231 du code civil, l'interruption efface le délai de prescription acquis et fait courir un nouveau délai de même durée que l'ancien. Le délai est interrompu par un acte d'exécution forcée et donc par un commandement de payer valant saisie immobilière.

B. Les spécificités procédurales de la saisie immobilière

Il faut tenir compte de la particularité de cette voie d'exécution qui depuis la réforme issue du décret du 27 juillet 2006, constitue une instance à part entière, qui s'achève par la publication aux hypothèques soit du jugement de vente forcée soit du jugement d'homologation de la vente amiable. Le régime procédural de la saisie immobilière est également concerné par les règles spécifiques de la caducité dont les conséquences sont l'anéantissement rétroactif des actes accomplis, et donc l'effet interruptif du commandement.

VI. La réforme du décret du 29décembre 2023 et ses implications

A. Les modifications apportées au régime des voies de recours

Le décret n° 2023-1391 du 29décembre 2023 a profondément modifié la procédure d'appel en matière civile, avec des répercussions sur le contentieux de l'exécution. Cette réformes 'inscrit dans une démarche de simplification et d'accélération des procédures. Elle autonomise la procédure d'appel en supprimant les renvois aux dispositions sur le tribunal judiciaire et structure de manière plus précise les dispositions relatives à la procédure d'appel.

Le décret introduit des éléments de souplesse à la procédure d'appel avec mise en état et à bref délai. Il autorise la partie ayant omis de mentionner certains chefs du dispositif du jugement dans sa déclaration d'appel à les ajouter dans ses premières conclusions plutôt que de former une déclaration d'appel rectificative. Les délais pour conclure dans la procédure d'appel à bref délai sont allongés d'un mois.

B. L'impact sur la procédure de saisie immobilière

L'arrêt commenté fait référence à la rédaction antérieure des textes, ce qui souligne l'importance de la période transitoire et des dispositions applicables selon la date d'introduction desinstances1. Cette précision technique révèle la complexité de l'articulation temporelle des réformes procédurales en matière d'exécution1.

La réforme vise notamment à rendre plus lisibles les règles de procédure applicables à l'appel. Elle supprime ou remplace les références à des notions ambigües, telles que l'indivisibilité ou la notion de chefs du jugement, et intègre dans le Code de procédure civile des solutions dégagées par la jurisprudence.

VII. Les perspectives de réforme de la procédure de saisie immobilière

A. Les propositions du Conseil national des barreaux

Le Conseil national des barreaux, sur la base des travaux menés par l'AAPPE (Association des Avocats des Procédures et de l'Exécution, a récemment formulé de nouvelles propositions de réforme portant notamment sur la suppression des audiences de rappel, l'optimisation des notifications et l'accélération de la modernisation par la mise en place d'une plateforme numérique des ventes judiciaires. L'assemblée générale a approuvé à l'unanimité les propositions de modifications législatives et réglementaires de la procédure de saisie immobilière.

Ces modifications visent à créer une procédure moderne, simplifiée et améliorée dans l'intérêt du débiteur saisi comme des créanciers, tout en permettant un allégement des tâches confiées aux juridictions. Le projet d'adaptation des textes législatifs et réglementaires a été initié en 2018 et poursuivi en 2022.

B. Les axes de modernisation

Le CNB propose notamment de supprimer les audiences de rappel et statuer sur requête, d'optimiser les notifications en passant directement par voie de signification, et d'accélérer la modernisation avec la mise en place d'une plateforme numérique des ventes judiciaires. Ces évolutions s'inscrivent dans une logique d'allégement des tâches confiées aux juridictions tout en préservant l'efficacité de la procédure et les droits des parties.

La modernisation passe également par la dématérialisation des procédures. Le développement de plateformes numériques d'information et de suivi des procédures constitue un enjeu majeur pour l'amélioration de l'efficacité du système judiciaire.

VIII. L'excès de pouvoir du juge de l'exécution

A. La notion d'excès de pouvoir en matière de saisie immobilière

L'excès de pouvoir constitue l'une des rares exceptions permettant un pourvoi immédiat contre les décisions du juge de l'exécution. En l'espèce de l'arrêt commenté, la Cour de cassation qualifie d'excès de pouvoir la violation du juge de l'exécution qui procède àl 'adjudication du bien sans tenir compte des règles légales.

Pour caractériser un excès de pouvoir, il faut que le juge ait commis une violation manifeste de ses attributions légales. Dans l'arrêt du 12 juin 2025, la Cour de cassation relève que le jugement attaqué avait constaté que le moyen tiré de la prescription avait été soulevé après l'audience d'orientation, ce qui rendait cette contestation irrecevable de plein droit. Le juge de l'exécution n'avait donc commis aucun excès de pouvoir en refusant d'examiner une contestation tardive.

B. Le contrôle de la Cour de cassation

La haute juridiction exerce un contrôle strict de la qualification d'excès de pouvoir. Elle vérifie que le juge de l'exécution a bien respecté les limites de ses attributions et n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'application des règles procédurales. Cette solution confirme la prééminence de l'article R. 311-5 sur les règles générales de procédure civile relatives aux fins de non-recevoir.

IX. Portée jurisprudentielle et enseignements pratiques

A. La confirmation d'une jurisprudence établie

Cette décision s'inscrit dans la continuité d'une jurisprudence constante de la deuxième chambre civile qui applique avec fermeté les règles de recevabilité des pourvois en matière d'exécution. Les références jurisprudentielles citées dans l'arrêt témoignent de cette continuité : Cass. 2e civ., 6 septembre 2018, n° 16-26.059 ; 4décembre 2014, n° 13-24.870 ; 6 décembre 2012, n° 11-24.443 et n° 11-26.683 ;11 mars 2010, n° 09-13.312.

Cette stabilité jurisprudentielle offre une sécurité juridique précieuse aux praticiens et permet d'éviter les recours abusifs ou mal fondés. Elle contribue également à la célérité des procédures d'exécution en décourageant les manœuvres dilatoires fondées sur un usage inapproprié des voies de recours.

 

B. Les leçons pour la pratique professionnelle

L'arrêt du 12 juin 2025 délivre plusieurs enseignements pratiques fondamentaux. Premièrement, il rappelle l'importance cruciale du respect des délais procéduraux en matière de saisie immobilière, particulièrement concernant l'audience d'orientation qui constitue un véritable couperet pour l'exercice des contestations. Les praticiens doivent donc veiller à ce que leurs clients soulèvent toutes leurs contestations avant cette échéance fatale.

Deuxièmement, la décision souligne la nécessité d'une qualification juridique précise des jugements pour déterminer les voies de recours appropriées. L'erreur de qualification commise par le tribunal de première instance n'a pas eu d'incidence sur la solution retenue, mais elle illustre les difficultés pratiques rencontrées par les juridictions dans l'application du régime complexe des voies de recours en matière d'exécution.

C. L'évolution du cadre tarifaire

L'élaboration du nouveau cadre tarifaire des avocats intervenant en matière de saisie immobilière constitue un enjeu majeur pour la profession. La reconduction du tarif jusqu'au 31 août 2025devrait permettre une évolution notable des travaux autour de l'élaboration du tarif des avocats intervenant en matière de saisie immobilière, de partage, de licitation et des sûretés judiciaires.

L'objet poursuivi par la loi du 6août 2015 dite "loi Macron" ayant supprimé l'ancien tarif de postulation devra assurer la couverture des "coûts pertinents du servicerendu" tout en fixant "une rémunération raisonnable définie sur la base de critères objectifs".

X. Les défenses alternatives àla saisie immobilière

A. La vente amiable :alternative privilégiée

Le débiteur poursuivi en paiement peut solliciter du juge la vente amiable du bien immobilier. Cette alternative à la vente forcée sert aussi bien les intérêts du débiteur que ceux du créancier puisque le prix de vente amiable est bien souvent supérieur à celui obtenu dans le cadre des ventes aux enchères publiques.

Même après que l'assignation en justice ait été signifiée au débiteur pour une audience d'orientation, ce dernier peut demander au juge de l'exécution que son bien immobilier ne soit pas vendu aux enchères publiques mais de manière amiable sous le contrôle du

juge. Il est vivement recommandé au débiteur de produire aux débats la copie d'un mandat ou d'un compromis de vente afin de justifier de sa bonne foi devant le juge.

B. Les vices de procédure

Le créancier poursuivant la vente forcée doit respecter le formalisme et les délais légaux au risque de voir annuler toute la procédure de saisie immobilière et de devoir la reprendre du début. Les différents vices de procédures susceptibles de pouvoir être invoqués par le débiteur incluent notamment le défaut de forme, l'incompétence ou l'incapacité de l'officier auteur de l'acte authentique.

La jurisprudence récente illustre ces enjeux avec l'arrêt du 6 mars 2025 où la Cour de cassation a examiné la nullité d'un commandement de payer valant saisie immobilière. La contestation de la validité du commandement soulevée après l'assignation constitue une exception de procédure qui doit être soulevée selon les règles de l'article R.311-10 du code des procédures civiles d'exécution.

 

Conclusion

L'arrêt de la deuxième chambre civile du 12 juin 2025 constitue une illustration exemplaire de la rigueur procédurale qui caractérise le droit de l'exécution immobilière. En prononçant une double irrecevabilité fondée sur des motifs distincts mais convergents, la Cour de cassation réaffirme deux principes cardinaux : la concentration des moyens à l'audience d'orientation et la limitation stricte des cas d'ouverture du pourvoi immédiat contre les décisions d'administration judiciaire.

Cette solution s'inscritparfaitement dans l'économie générale de la procédure de saisie immobilièretelle qu'elle résulte de la réforme de 2006. Elle témoigne de la volontéconstante du législateur et du juge de concilier l'efficacité de l'exécutionforcée avec le respect des droits de la défense. L'évolution récente du cadreréglementaire, notamment sous l'influence du décret du 29 décembre 2023, neremet pas en cause ces équilibres fondamentaux mais contribue à leurperfectionnement.

La modernisation de la procédure de saisie immobilière s'inscrit dans une démarche plus globale de simplification et de dématérialisation des procédures judiciaires. Le propositions du Conseil national des barreaux témoignent de la volonté de profession d'accompagner cette évolution tout en préservant l'efficacité du système et les droits des justiciables.

Pour les praticiens, cet arrêt constitue un rappel salutaire de l'importance d'une stratégie procédurale rigoureuse dès les premiers stades de la procédure de saisie immobilière. Ils ouligne également la nécessité d'une parfaite maîtrise des régimes de recours spécifiques au droit de l'exécution, dont la complexité technique ne saurait masquer la cohérence d'ensemble. La lutte contre le formalisme excessif, désormais consacrée par la jurisprudence, impose aux juridictions un contrôle de proportionnalité qui favorise l'accès au juge tout en préservant l'efficacité procédurale.

En définitive, cette décision participe de la construction d'un droit de l'exécution moderne, efficace et respectueux des exigences du procès équitable. Elle illustre la capacité du système juridique français à évoluer et s'adapter aux enjeux contemporains tout en préservant ses principes fondamentaux. L'équilibre entre rigueur procédurales et accessibilité de la justice demeure un défi permanent que la jurisprudencede la Cour de cassation s'efforce de relever avec pragmatisme et discernement.

 

Guillaume Fricker | Avocat

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